jeudi, août 14, 2003

Venise sous la neige

C'est le titre de la pièce de théâtre que je suis allé voir il y a quelques jours avec toute ma smala familiale, j'ai nommé mes parents, mon frangin, ma soeurette et son copain, histoire de marquer le coup pour les 30 balais de cette dernière.

Je vous épargne le pitch de la pièce (si vous voulez savoir de quoi elle cause, allez donc la voir !), mais vous fais plutôt part de deux réflexions que me laisse le souvenir de cette sortie.

D'une part, ma soeur a 30 ans. Vous vous en moquez peut-être, mais moi, ca me fait quelque chose. Pour elle comme pour moi.

Pour elle, parce que honnêtement, je la voyais plus vieille que ça ! Ou plutôt, je ne lui donnais pas d'âge... mais comme il s'agit de "ma grande soeur", ben je la vois forcément plus âgée que moi, et par extension (fallacieuse) que les amis qui m'entourent.
En fait, pas du tout !

J'ai fêté l'anniversaire de nombre de nouveaux et nouvelles trentenaires de mon entourage cette année.
En fait, ma soeur n'est ni plus ni moins âgée de la plupart de mes amis !
Voilà qui réduit grandement l'écart que nous avions à mes yeux... et qui, par une incontrôlable transitivité de mon esprit, me vieillit d'autant.

Et c'est là que ses 30 ans m'interpellent également en regard de ma propre existence.
Que penser devant le constat que j'achève ma troisième décennie, et que je n'ai encore rien construit de tangible et de solide (à part moi-même, et encore, ca dépend des jours...) ?
Je suis célibataire, locataire de mon appart, pas toujours à ma place dans mon travail...

Oh, attention, c'est pas un coup de déprime que je vous fais là !
Simplement que de temps en temps, il faut bien constater les faits. Mesurer l'avancée avec des jalons, des repères. Et de ce côté là, il faut bien reconnaître que je ne marque pas beaucoup de points, malgré mes 27 et quelques années de déjà consommées.

Alexandre Jollien, écrivain philosophe contemporain et néanmoins considéré comme "handicapé mental" puisqu'il en a les caractéristiques extérieures (motricité réduite, langage hésitant, postures et mimiques singulières...), disait lors d'une émission télévisée qui m'a captivé cette nuit entre 1 et 2H du matin, que la souffrance et les épreuves de la vie doivent être des moteurs de celles-ci, et qu'il faut parvenir à leur donner un sens pour les accepter et les utiliser à de joyeux desseins (il a écrit "le métier d'homme", je pense que j'acheterai ce bouquin tant le personnage m'a séduit et ses propos fasciné).

Je me rends compte que j'essaie depuis quelques mois d'appliquer ce principe sans doute vrai, mais que je peine à y arriver.
Ma rupture d'avec Luna par exemple m'a fait prodondément souffrir en début d'année (comme toutes les ruptures d'avec une personne que l'on aime profondément je suppose).
Depuis cet événement vécu comme un drame, j'ai cherché d'une part à le comprendre, et d'autre part à lui donner un sens par rapport au devenir de mon existence.
Que pourrait-il bien m'apporter de positif ?

A ce jour, j'ai trouvé quelques réponses à ces questions, mais certainement pas toutes celles dont j'aurais besoin.
D'ailleurs, je ne suis pas aussi sûr que ça d'avoir complètement tourné la page d'avec cette histoire, car si j'ai bien compris que par rapport à l'individu qu'elle est, plus rien n'est possible -ni souhaitable- tant elle a stigmatisé une vision de moi et une expérience qui est sienne, et qu'elle s'est construite en tant qu'Etre en conséquence.
Qu'elle en ait ou non conscience, qu'elle le veuille ou non, la Luna d'aujourd'hui n'est plus celle que j'ai rencontrée et avec qui j'ai cru que faire ma vie était possible.

Il en va de même pour moi. Cette expérience m'a changé.
La question n'est pas de savoir si c'est en mieux ou en moins bien.
Je l'ai simplement intégrée à ce que je suis, digérée, et elle doit à présent me servir de nutriment pour me mouvoir dans l'existence qui s'ouvre à moi.

Pourtant, bien que convaincu de tout cela, je me prends à rêver d'une relation strictement identique à celle que nous avions à nos débuts.
Parce que pour moi, nous n'étions pas loin de l'Idéal.
Sur son chemin en tout cas : un apprentissage de l'autre progressif et sincère, une tendresse et une quiétude quotidiennes mâtinées de folies passagères partagées... Bref.

Tout ca pour dire que je navigue encore malgré moi entre nostalgie et appétit de vivre.
Mais j'aime à croire que bientôt, je rencontrerai la personne qui m'aidera à ne conserver que ce dernier. Je lèverai alors les voiles tissées avec les fils mon passé et nous voguerons ensemble vers un horizon de bonheur commun.

En fait, je n'aurais pas du prendre l'image du voilier, mais plutôt celle du bateau à vapeur dans lequel nous enfournerions notre charbon de passé comme combustible... ça m'aurait permis d'amener plus simplement ma transition vers le fait que je me suis acheté une centrale vapeur il y a quelques semaines dans l'espoir d'y gagner quelque peu de productivité en matière de repassage, et qu'avec la canicule de ces jours derniers, je n'ai pas trop eu le temps d'en faire bon usage.

Ce qui m'amène à vous informer de la raison pour laquelle je vous quitte à présent, le thermomètre semblant avoir retrouvé la voie de la sagesse...